Journée mondiale de la prévention du suicide
C e Lundi 10 septembre
est la journée mondiale de la prévention du suicide.
Depuis 15 ans, j’anime de nombreux stages en milieu hospitalier auprès des soignants sur
l’évaluation du risque suicidaire et la prise en charge des suicidants.
De plus, j’ai participé pendant 7 ans à des actions de terrain et de prévention du suicide avec la Fédération Phénix.
Cette nouvelle de la baisse du nombre des suicides en France ne peut que
me réjouir, mais en partie seulement. Je dis bien en partie, car si cette
baisse est notable par rapport au chiffre de 10
400 personnes suicidées annoncé en 2006, nous restons toujours
l’un des pays d’Europe où l’on se suicide le plus. La dépression, l’isolement
social font encore des ravages en France et les idées reçues ont la vie
dure. Oserais-je vous rappeler le nombre de décès par accident de voiture
juste pour mémoire ?
Comment
expliquer la baisse des suicides en France ?
Par Laure Cometti
Publié le 05/02/18 à 17h32 dans le journal 20 Minutes
“Le nombre de suicides a baissé en France, l’un des pays où l’on se suicide le plus en Europe.
Cette diminution peut être attribuée au progrès
en matière de prévention et de suivi des patients selon plusieurs
experts.
Une personne met fin à ses jours chaque heure en France. S’il reste trop
élevé (d’autant qu’il est sans doute sous-estimé), le nombre de suicides
a baissé de 26 % en une décennie, s’établissant à 8.885 en France métropolitaine
en 2014. Cette diminution, amorcée dans les années
1980, est complexe à expliquer mais les sociologues et les psychiatres
l’attribuent à plusieurs facteurs.
Démocratisation des antidépresseurs
“ La baisse du suicide observée depuis 1985 étonne du fait que le
chômage demeure à un niveau élevé, les fermetures d’entreprise vont bon
train, les salaires stagnent, des régions entières sont frappées par la
désindustrialisation. Le cercle de la précarité s’est élargi, affectant
désormais tous les secteurs d’activité et même la fonction publique ”,
écrivent les sociologues Christian Baudelot
et Roger Establet dans Suicide. L’envers
de notre monde.
S’il est “ très dur d’établir les causalités complètes ” du
suicide, Christian Baudelot souligne auprès de 20 Minutes les progrès
en matière de prévention et de soin. “ Non seulement les antidépresseurs
se sont démocratisés, mais ce n’est pas seulement une affaire de chimie.
Il y a eu tout un changement de regard sur le
suicide et les maladies mentales dans notre société. Le développement
de la psychiatrie et des associations de prévention ont sûrement eu un
effet important ”.
Plus de sensibilisation et de prévention
“ Depuis quelques décennies, un travail de sensibilisation et de
prévention a été mené par les professionnels de santé et les associations
”, abonde Jean-Jacques Bonamour du Tartre,
président de la Fédération française de psychiatrie (FFP).
“ La formation
des personnels et l’information du grand public se sont développées, tout
comme les numéros d’appel ”, poursuit-il.
L’association suicide écoute a ainsi été
fondée en 1994 pour répondre 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24 aux appels
de personnes en détresse (01 45 39 40 00).
Selon sa présidente, “ les risques psychosociaux sont mieux pris en compte dans la société
et notamment au sein des entreprises ”, ce qui peut participer de la baisse du nombre de suicides.
Un meilleur suivi pour enrayer les récidives
Christian Baudelot émet une autre hypothèse : les nouvelles technologies
permettraient de maintenir un lien social. “ Les SMS, le téléphone
portable, Internet et les e-mails permettent de multiplier les contacts,
de maintenir un lien social. Il n’y a pas encore de grande étude sur cette
question mais les chercheurs commencent à s’y intéresser ”, explique
le professeur émérite à l’École normale supérieure (ENS). Les
associations de prévention et les psychiatres s’emparent aussi de ces
nouvelles technologies pour lutter contre le suicide. “Il existe
des programmes qui proposent de contacter les personnes par SMS après
une tentative de suicide, afin de maintenir le contact, de prévenir la
récidive ”, note Jean-Jacques Bonamour du Tartre.
La ministre de la Santé a exprimé son souhait de généraliser le dispositif
Vigilans expérimenté dans Nord-Pas-de-Calais, puis en
Bretagne, en Normandie, en Occitanie et dans le Jura. Le principe : les
personnes hospitalisées après une tentative de suicide (78.128 patients
en 2015 selon l’ONS) sont recontactées dix à vingt jours après leur sortie
de l’hôpital par des professionnels de santé et sont prévenues par courrier
ou SMS avant chaque appel, et ce pendant quatre mois.
“ Ce travail de
terrain et les efforts conjugués des professionnels et des bénévoles portent
leurs fruits ”, observe-t-on chez Suicide écoute.
Encore de gros progrès à faire
Les nouvelles technologies sont néanmoins à double tranchant : chez les adolescents, elles peuvent
être un “ vecteur de contagion de certains comportements à risque ”, prévient l’ONS qui qualifie
de “ priorité de santé publique ” la prévention du suicide chez les jeunes.
En outre, “ les pratiques numériques (…) ont parfois pour effet de réduire la durée de leur sommeil,
de diminuer leur activité physique et de les surexposer aux médias, ce qui les prédispose fortement aux symptômes dépressifs
et anxieux ainsi qu’aux idées suicidaires ”. Le suicide est la deuxième cause mortalité chez les 15-24 ans,
après les accidents de la route.
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